Barème Macron : La contestation des juridictions prud’homales prend de l’ampleur

04/06/2019

Créé par l’Ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 et revêtu d’une valeur législative par l’entrée en vigueur de la loi n°2018-217 du 29 mars 2018, le barème de l’article L. 1235-3 du Code du travail, dit « Barème Macron », encadre le montant de l’indemnité que le juge peut octroyer au salarié en réparation du préjudice que lui a causé le caractère abusif de son licenciement.

Ce barème, qui s’applique à tous les licenciements notifiés depuis le 24 septembre 2017, divise les praticiens entre ceux qui y voient l’avènement d’une sécurité juridique salutaire pour les entreprises, et les autres qui le jugent contraire au principe de la réparation intégrale du préjudice du salarié abusivement licencié.

Ainsi, dès son entrée en vigueur, la conventionnalité du barème Macron a été contestée par la CGT sur le fondement des articles 10 de la Convention n°158 de l’Organisation Internationale du Travail (OIT) et 24 de la Charte sociale européenne, qui prévoient le principe de réparation intégrale du préjudice subi par le salarié abusivement licencié.

Le Conseil d’Etat, saisi de cette contestation, a jugé l’article L. 1235-3 du Code du travail comme étant conforme aux dispositions précitées, dans sa décision du 7 décembre 2017.

Cet arrêt n’a cependant pas mis fin à la contestation de la conventionnalité du barème, qui se poursuit devant les juridictions prud’homales.

Ces dernières avancent en ordre dispersé, les Conseils de prud’hommes du Mans, de Caen, du Havre et de Tours s’étant prononcés en faveur de la conventionnalité du barème, tandis que ceux de Paris, d’Amiens, de Lyon, de Troyes, d’Angers et d’Agen l’ont jugé inapplicable sur le fondement des dispositions de la Convention n°158 de l’OIT et de la Charte sociale européenne. Le jugement du Conseil de prud’hommes d’Agen a eu une résonance particulière dans la mesure où il s’agissait de la première décision sur la question de la conventionnalité du barème à être tranchée par un magistrat professionnel, à savoir un juge départiteur, et qu’il l’a jugé inapplicable. Cette question divise au sein même des Conseils de prud’hommes, deux sections s’étant prononcées en sens contraire au sein des Conseils de prud’hommes de Paris et de Grenoble.

Devant l’insécurité juridique soulevée par ces jugements disparates, la Chambre Sociale de la Cour d’appel de Paris, première Cour d’appel à être saisie de cette question, a sollicité l’avis du Parquet général.

Le 23 mai dernier, le Parquet a conclu à la conventionnalité du barème.

Il convient cependant de préciser que l’avis du Ministère public ne lie pas la Cour d’appel, qui est libre de statuer conformément ou non aux conclusions de l’avocat général.

La Cour d’Appel de Paris devrait rendre sa décision le 25 septembre prochain.

La Cour de cassation pourrait cependant se prononcer avant cette date. Elle a en effet été saisie pour avis sur la conventionnalité du barème par les Conseils de prud’hommes de Louviers et de Toulouse. Son avis devrait être connu le 8 juillet prochain.

Un doute subsiste cependant quant à la recevabilité d’une demande d’avis portant sur la conventionnalité d’un texte de droit interne.

Si ces demandes d’avis devaient être déclarées irrecevables, il est probable que le débat se poursuivrait au sein des Cours d’appel avant que la question ne soit définitivement tranchée par la Cour de cassation.

 

Charles Sabbe

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